Afin de compléter notre article psychédélique sur la sitcom du Collège des Cœurs Brisés, il nous a semblé pertinent de tenter d’établir une sorte de Top5 de ses épisodes les plus dingues. Le choix a été difficile et sera sûrement contestable. Néanmoins, cette liste donne une certaine idée de la folie latente de cette série culte.
1. « La tristesse des torchons de cuisine »
Cet épisode est un climax du Collège des Cœurs Brisés. Le surréalisme version AB poussé à son paroxysme. Il est très difficile d’expliquer par des mots ce qui se passe à l’écran. Ce que l’on peut dire, c’est que Monsieur Rambier présente sa plus belle création : « La machine à projeter des fantasmes ». Avec cette invention, nous sommes invités à plonger dans un monde parallèle, celui des fantasmes des protagonistes. Autant dire que ça ne va pas être beau à voir.
Il semble évident que les scénaristes ont eu carte blanche pour s’exprimer, quitte à nous envoyer en total bad trip. Par où commencer pour expliquer l’histoire du torchon de serviette humide et géant ? Les dialogues n’ont aucun sens, et les même mots sont souvent répétés en boucle, donnant une tonalité hypnotique à l’épisode. Vraiment fascinant. En outre, jamais on n’entendra à autant de reprises les fameux « François, Mathilde, François, Mathilde« , auxquels s’ajoute ici le prénom de Gérard, dans ce délire propre à la série.
Le chaos et l’hystérie se propagent sur l’ensemble des personnages, mais à un niveau supérieur à ce qu’on a l’habitude de voir. L’épisode ferait presque passer Pas de pitié pour les croissants pour un vulgaire épisode de Derrick. Même les figurants sont appelés à participer à cette anarchie visuelle et sonore. On peut les voir danser le « Pont d’Avignon » et surtout, la « Saga Africa », alors gros tube du moment. Mention spéciale à un figurant en particulier, le figurant-zombie, dans une prestation courte mais inoubliable. Le téléspectateur se pince pour y croire. Comment un diffuseur a-t-il pu laisser passer un tel épisode ? Que faisait le CSA à l’époque ? Il est impossible d’expliquer le pourquoi du comment de la « tristesse des torchons de cuisine ». Il vaut mieux le regarder en consommant un maximum de stupéfiants, et se laisser porter.
2. « Le X sur le Z »
Épisode totalement sous LSD encore, puisqu’il s’agit pour les scénaristes de jouer sur les changements de sexe des personnages, tout en intégrant un extraterrestre. Il est évident que ceux qui ont écrit un truc pareil n’ont pas sniffé que des frites. Mathilde devient François, François devient Mathilde. On ne sait plus. Le professeur taré du Collège a en effet encore commis une nouvelle invention : « l’optimus mega ». Une machine révolutionnaire permettant à quiconque de se mettre à la place d’un autre être humain. Mais Jérémy va foutre sa merde.
Alors que cet abruti tente d’utiliser la machine à écrire de Monsieur Rambier (une royale 945), une forme rose bizarre apparaît. Oui, Jérémy a mis un Z au lieu du Y à son prénom (une histoire de chromosome, seul hic, le Z n’existe pas, mais on n’est plus à ça prêt à ce moment-là). Alors que tous les personnages ont instantanément changé d’identité sexuelle (Julien en Sylvie et Gérard en Fabienne), Jérémy part lui dans un délire cosmique : « Je ne suis que l’enveloppe de la philosophie granulée. Et je suis là pour répandre la parole de l’extraterrestre. » S’en suit des histoires de langoustine, « symbole de l’humanité », sa carapace cachant « des secrets de bonté et de trésor. »
L’épisode tourne alors à l’orgie, à base d’immondes baisers collectifs, de danse macabre et de références aux langoustines du parc du collège. Une partie de morpions endiablée mettra fin à cette histoire improbable.
On laissera au lecteur le soin d’interpréter le dialogue final : Mr Rambier : – Qu’est-ce qui vous a poussé à être moi, Mathilde, en même temps que deux autres moi, je veux dire Fabienne et Sylvie ?
Mlle Gauthier, honteuse : – Il y avait déjà deux François : Sylvie et Fabienne. Alors je ne pouvais pas faire autrement que d’être un troisième François. Comme j’avais déjà eu cet honneur, c’était beaucoup plus facile pour moi et tellement excitant.
3. « Les déesses n’ont pas d’yeux »
L’épisode démarre par le classique de la sitcom : un plan sur Monsieur Rambier dans son bureau, en pleine séance d’écriture ou de réflexion, walkman dans les oreilles. S’en suit un dialogue typique des deux professeurs, c’est-à-dire, sans queue ni tête :
Mr Rambier : – Vous voulez savoir pourquoi je veux apprendre à dire « je t’aime » en Sanskrit Mathilde ?
Mlle Gauthier : – Oh oui François, dites le moi François.
Mr Rambier : – Pour vous dire « je t’aime » en Sanskrit, Mathilde.
Apparaît alors une princesse, nommée Stéphanie de Monaco (!). C’est Manuela Lopez qui joue ce « rôle », son premier chez AB. Une première grandiose, puisque la princesse est « tellement belle qu’aucun garçon ne peut la regarder sans être paralysé. » Et évidement, tous les garçons de la classe tombent dans le piège.
En fait, Stéphanie de Monaco est la fille du chef de l’établissement du Collège. On apprend enfin ce qu’est arrivé à ce dernier : il a eu le cœur brisé par une danseuse espagnole qui l’a quitté pour un trapéziste guatémaltèque (!). Mais le vrai problème de l’épisode, c’est Fabienne, qui est littéralement collée au plafond. Même Monsieur Rambier n’a pas de solution à ce problème « scientifique ». Il use alors d’une méthode bien particulière : « C’est en élevant la température de mon cerveau que j’ai une chance d’activer mon intelligence et de trouver la clé de ce mystère. » Monsieur Rambier demande de l’eau bouillante et des serviettes. Mais l’expérience échoue et Monsieur Rambier se prend pour un… oiseau des îles, volant en brassant des bras par un effet spécial que Georges Lucas ne renierait pas pour une réédition Blu-ray du Collège.
Pour finir l’épisode, Stéphanie de Monaco, qui cherche évidemment à retrouver son prince, se met de l’eau dans les cheveux. Elle finir par expliquer le pourquoi du comment. Là, il faut s’accrocher : « Parce que j’ai les cheveux secs et que je dois les humecter toutes les trois heures ». C’est alors que son amoureux débarque, le « Prinche Armand ». Celui-ci lui avoue qu’il a aussi « les cheveux tellement gras (…) que je dois mettre une éponge sur ma tête, toutes les trois heures également. » Les deux amants, visiblement fait l’un pour l’autre, se remettent ensemble et Monsieur Rambier nous gratifie d’une sublime leçon de vie : « Comme quoi les enfants, il existe une leçon à toutes ces aventures. Il n’existe pas de parfaite beauté. Il y a toujours un défaut pour remettre les choses à leur place. »
4. « Les tams-tams de l’amour »
Encore une nouvelle « trouvaille » de Monsieur Rambier à base de… bananes. Encore une fois, le professeur est un génie incompris :
Mr Rambier : – Je viens de découvrir une chose extraordinaire, qui va guérir nos chers petits cœurs brisés. Mais il faut absolument des bananes, tout de suite.
Mlle Gauthier : – Des bananes ?
Mr Rambier : – Mais enfin Mathilde, vous ne voyez pas le rapport entre l’amour et les bananes ? Pour une raison qui m’est encore obscure mais que je suis en train de calculer, j’ai découvert que les bananes flambées empêchaient le cœur humain de s’enflammer. J’ai découvert ça au départ d’une manière empirique. Vous savez que j’adore les bananes flambées. Eh bien, à chaque fois que j’en mangeais, je me suis aperçu que je pensais un peu moins à vous. Après avoir fait cette troublante constatation, je me suis mis au travail, et je suis arrivé à cette géniale équation : toutes les 57 bananes flambées, le feu de l’amour réduit de moitié.
Mathilde, comme toujours, est incapable de résister à ses pulsions. Heureusement, Monsieur Rambier lui est au contraire implacable (du moins, il essaye de le faire croire). Comme il le rappelle, dans le Collège des Cœurs Brisés, l’amour n’a pas sa place : « Ce feu qui nous dévore doit mourir. C’est notre devoir de professeur du Collège des cœurs brisés, notre ultime mission. Hélas, Mathilde, il faut avoir le sens du sacrifice. En attendant Mathilde, vite, allez me chercher des bananes. » Mathilde s’exécute mais Monsieur Rambier glisse sur une peau de banane et se métamorphose en… Tarzan. On le voit maladroitement imiter un homme-singe, cherchant vaguement des bananes et bien évidemment sa Jane. Franck Jolly doit encore aujourd’hui maudire JLA et ses scénaristes de l’avoir obligé à faire ça…
Tandis que Mademoiselle Gauthier, totalement désespérée, demande aux garçons de trouver d’urgence une solution pour ramener Monsieur Rambier à la raison, Sylvie se déguise en Jane pour assouvir la volonté de son professeur. Heureusement pour nos yeux, nous n’assisterons pas aux ébats sexuels des deux sauvageons. Gérard finit par assommer Monsieur Rambier et tout se termine plus ou moins bien (Sylvie achevant l’épisode sur une sauvage tentative de viol sur son professeur).
5. « Même les poètes meurent debout »
Alors que Monsieur Rambier est tranquillement à son bureau, Mathilde vient une fois de plus l’importuner au sujet d’un certain Piottre Berjonick, un poète suédois qu’elle apprécie beaucoup. Ce qui n’est pas le cas de François, passablement énervé par cette discussion.
Les élèves aussi vénèrent le poète au nom improbable, et lisent tous dans un suédois approximatif les textes de Piottre. Car en effet, si Sylvie et ses copines lisent le livre en suédois, c’est plus proche du baragouinage du fameux « katouchois » des Filles d’à Côté que de la langue de Tom Schacht…
Seul Gérard manifeste à son tour un « aaaaaaah » de rage contre ce mystérieux écrivain. On apprend que ce dernier doit venir au Collège. Et là, c’est la consternation : Monsieur Rambier et Gérard ont disparu. Mathilde est forte inquiète, mais il faut se préparer avant tout à accueillir le grand poète.
Alors que l’euphorie gagne les collégiens, ce n’est pas Piottre qui débarque, mais Monsieur Rambier et Gérard, « déguisés » en suédois. Finalement, Monsieur Rambier est obligé d’avouer la vérité : avec Gérard, il a lui-même inventé Piottre Berjonick, afin d’écrire des poèmes d’amour en suédois. Choquée mais compréhensive, Mathilde demande alors à François comment il peut écrire, avec autant de talent, sur l’amour en suédois. Mr Rambier fait alors une drôle de confession : « Je ne parle pas suédois« . Quelle chute !