La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu’il n’existe pas.
Charles Baudelaire.
Si Isabelle est bien la reine incontestée et incontestable des pestes de Premiers Baisers, d’autres garces ont participé à cette brillante vision de la femme diabolique omniprésente dans les sitcoms AB. Avec seulement une poignée d’épisodes à son actif, Céline Leclercq réussit le tour de force de rentrer dans le panthéon de ces « bitches » AB avec son personnage de Valentine. Chose relativement rare pour un « second couteau », son personnage est cœur d’une intrigue étalée sur quatre épisodes consécutifs, articulés autour d’un seul arc narratif, simple mais brutal : la lente et implacable mise en application d’un « plan machiavélique » pour détruire le couple de Virginie afin de lui piquer « son » Luc.
La bonne copine
Tout commence lors de l’épisode « La bonne copine ». Cette soi-disant « copine », c’est une certaine Valentine qui rencontre pour la première fois Annette à la cafète. La binoclarde est alors en pleine séance d’écriture pour ses « poèmes », des textes qui sont en réalité la risée de ses amis et même de Joël ! Mais Valentine se montre en totale admiration. Elle se permet même de passer la tête au dessus de l’épaule d’Annette pour lire ses écrits.
C’est la première étape de son « plan » de séduction d’Annette. Elle lui affirme alors hypocritement : « Ça a l’air super ce que tu écris. J’ai tout de suite senti que tu devais être quelqu’un de très intéressant. » Annette est gênée mais absolument ravie par cette inconnue qui est la première à reconnaître son talent. Valentine poursuit la lèche en sortant la brosse à reluire : « Je sais comment tu t’appelles. Au lycée tout le monde te connaît… ! » Mais alors qu’Annette joue les fausses modestes en expliquant qu’elle n’est pas vraiment poète, qu’elle écrit simplement des « petits trucs », Valentine ose une comparaison improbable : « Mais Rimbaud et Verlaine aussi c’était des petits trucs (sic) comme ça qui leur passait dans la tête. Les poètes sont jamais conscients qu’ils sont des poètes. »
Encore sous le choc de cette révélation, Annette parait totalement envoûtée par les paroles de la fille. Le travail de sape continue quand Annette parle de son poète préféré, le seul et unique homme de sa vie, Monsieur Girard, le célèbre auteur de « Amour Toujours ». Comme par hasard, Valentine se dit « fan » de la série, quitte à en faire trois tonnes : « Je me débrouille toujours pour être chez moi quand ça passe à la télé. » Annette est définitivement sous le charme de cette « nouvelle copine », avec laquelle elle dit avoir « plein de points communs. »
Devant l’insistance d’Annette, Valentine finit par accepter de se présenter. Modeste, elle préfère ne pas parler trop d’elle. Elle explique néanmoins être « en Terminale. » Annette fait immédiatement la remarque comme quoi elle ne l’a jamais vue à la cafète. Valentine l’explique par le fait qu’elle « ne sort que très peu », étant « assez sauvage ». Elle préfère « rester chez elle » car elle « préfère la lecture. »
S’en suit une conversation édifiante dans laquelle les deux filles s’auto-congratulent d’être supérieures à leurs petits camarades. Tout est bon alors pour flatter l’égo d’Annette. Valentine se lance ainsi dans une diatribe contre les « jeunes d’aujourd’hui » : « La plupart n’ont rien dans la tête, ils ne pensent qu’à s’amuser, draguer, s’embrasser. C’est rare de rencontrer quelqu’un qui ait une âme (sic). C’est très difficile de rencontrer un garçon intelligent. Et l’intelligence pour moi, c’est ce qu’il y a de plus important. » Annette est relativement embarrassée face un tel discours (cette description des jeunes d’aujourd’hui étant en quelque sorte le quotidien de sa petite vie de lycéenne lambda), mais n’en reste pas moins d’accord sur le fond. Et quand ses petits camarades arrivent à la cafète, elle paraît presque honteuse de les présenter : « Voilà mes amis. Bon, niveau intelligence… mais ça va, ils sont sympas. »
Joël, Virginie et Luc font donc la connaissance de cette mystérieuse fille, décrite par Annette comme une « copine super intelligente. » Mais un premier élément aurait du immédiatement mettre la puce à l’oreille d’Annette, perdant dans cette histoire toute lucidité face à l’attitude mielleuse de Valentine :
Luc : – « Bonjour. Eh mais dites moi je crois qu’on se connaît ?
Valentine : – Oui, on est presque voisins. Vous habitez prêt du squat ?
Luc : – Oui.
Valentine : – Moi, j’habite juste derrière.
Annette : – Ah c’est marrant les hasards comme ça, vous auriez très bien pu habiter chacun à l’autre côté de la ville !
Luc : – Ah bah oui tu vois ça arrive. »
Oui, « ça arrive », mais la bande va progressivement découvrir que rien n’arrive par hasard avec Valentine ! En attendant, dans la scène suivante, on apprend que Annette se casse la gueule dans des escaliers après avoir appris que Géraldine a attrapé la varicelle… tout comme Jérôme ! Si Virginie pense qu’elle a surtout « l’esprit mal placé », Annette persiste : « Je trouve ça quand même bizarre. » Pour le coup, Annette est davantage perspicace vis-à-vis du petit jeu de Géraldine, mais perd sa légendaire intuition quand il s’agit de Valentine. Par contre, Virginie a immédiatement des doutes quant aux intentions de Valentine vis-à-vis de Luc. L’histoire lui donnera raison.
Valentine rejoint les deux « meilleures amies » dans le couloir du lycée. Annette, qui abhorre alors un joli plâtre, est toute heureuse de voir sa nouvelle copine venir « prendre des nouvelles » de son bras. Valentine, plus mielleuse et maniérée que jamais, feint de s’inquiéter pour sa nouvelle copine : « Tu dois tellement souffrir… » Mieux, elle lui offre un premier cadeau (ce sera pas le dernier), un « bouquin de poésie surréaliste (…) un peu comme tu fais avec tes poèmes. » Annette est honorée d’un tel présent et pour la remercier à son tour, lui propose de venir déjeuner chez les Girard afin qu’elle puisse enfin rencontrer l’auteur d’Amours Toujours.
Valentine accepte avec plaisir, mais sur le chemin, les filles croisent la route d’Isabelle. On découvre que la « peste » de Premiers Baisers « connaît très bien » Valentine. Elle lui pose alors une question surprenante, surtout de sa part : « Tu es venue semer la zizanie comme d’habitude ? » Heureusement pour Valentine, le crédit d’Isabelle est à peu près égal à zéro, et Annette ne prend même pas la peine de comprendre ce que veut sous-entendre Isabelle. Mais déjà, même le téléspectateur le plus débile de Premiers Baisers a compris : Valentine n’est pas venue pour enfiler des perles avec Annette. Elle joue dans la même cour qu’Isabelle, ce qui promet un beau merdier pour la petite bande.
Chez les Girard, Valentine écoute religieusement Monsieur Girard parler d’Amour Toujours . Il semble évident qu’elle ne connaît rien à la série du père de Justine, mais personne ne le remarque. Il faut dire à sa décharge que Amour Toujours est véritable ovni inaccessible aux non-initiés, surtout quand c’est Monsieur Girard lui-même qui explique le pitch du futur épisode qu’il a écrit : « Samantha va rencontrer un camionneur dans le désert du Colorado. Mais, attention, ce camionneur n’est autre que le fils naturel de la tante de John. Et c’est pas fini. Le plus terrible, c’est que le camionneur ne sait pas qu’il est le fils naturel de la tante de John ! » Un constat : Amour Toujours parait être une sorte de mixe entre Dynastie et le Collège des cœurs brisés. Il faut l’entendre pour le croire !
De retour au lycée, Virginie explique à Annette qu’elle a perdu sa chemise. La même qu’elle a montré à Valentine chez les Girard, avant de la poser sur le canapé. Et ses soupçons se portent sur cette dernière : » J’ai cru apercevoir ma chemise dans le sac de Valentine. » Annette hausse rapidement le ton : « Tu oses dire que Valentine est une voleuse ?! Je sais très bien que tu ne l’aimes pas beaucoup. C’est pas très bien d’être jalouse tu sais. » Virginie a beau nier, il y a une part de vérité. Mais elle sait ce qu’elle a vu. Isabelle revient vers les filles pour leur expliquer qui est vraiment cette Valentine : « Tu sais Annette, tu devrais changer de lunettes. Tu n’as pas encore vu son petit manège (…) Cette fille sème la pagaille partout où elle passe. En plus, elle a de drôles de manières. En tout cas tu pourras pas dire que je ne t’ai pas prévenu. »
Néanmoins pour Annette, l’attitude d’Isabelle est évidente : comme Virginie, cette peste est tout simplement jalouse de sa nouvelle amitié. En outre, l’histoire de la chemise trouve enfin une explication quand Valentine lui offre un second cadeau… une chemise, la même que celle de Virginie ! Ayant « emprunté » celle de Virginie pour être sûr de ne pas se tromper, Valentine avait une fois de plus voulu remercier Annette pour sa gentillesse ! Virginie, confuse et désolée, ne peut s’empêcher de trouver la situation étrange. Mais le pire est à venir pour elle quand elle s’aperçoit que c’est bien son petit ami qui a amené Valentine en moto ! Sacrilège !
Travail de sape
L’épisode « Chacun son tour » voit la poursuite de l’œuvre destructrice de Valentine. A la cafète, Joël et Luc, le mythique duo de coursiers, s’ennuient en attendant leurs copines. Joël pense qu’ils devraient « travailler à mi-temps » afin de les voir plus souvent, tandis que Luc se contente de ressasser : « C’est tous les matins la même chose. » Ils sont accompagnés de Valentine, qui profite de la situation pour glisser une belle pique à l’encontre de Virginie : « C’est vrai que c’est vraiment très désagréable les gens qui arrivent constamment en retard (…) Bon Annette, c’est normal, elle a le bras dans le plâtre. C’est un handicap, d’accord. Mais Virginie, vraiment je vois pas, je comprends pas du tout. » Si de son côté Joël trouve une excuse à Virginie (« elle doit attendre Annette »), ce n’est pas le cas de Luc, qui semble douter. Il finit bon gré mal gré par acquiescer aux allusions perfides de Valentine quand celle-ci répond à Joël : « Oui, peut-être, ou alors, est-ce qu’elle n’est pas très pressée de te voir Luc… »
Les filles finissent par arriver à la cafète. On apprend que c’est bien Annette la responsable de ce retard. Monsieur Girard ayant la varicelle, c’est Madame qui a eu pour mission de s’occuper de lui (Annette étant susceptible d’être contaminée). Mais elle a fait la « bêtise » de mettre de la confiture de fraise au lieu de miel sur ses tartines. Et Virginie confirme ce que tout le monde a pu constater : « Les tartines de Monsieur Girard, c’est sacré. »
Si les garçons sont ravis de pouvoir enfin embrasser leurs copines, l’ambiance au cours de la matinée va peu à peu dégénérer. Valentine allume une première mèche en s’adressant directement à une Virginie fâchée d’apprendre que Luc a encore accompagné sa rivale à moto : « Tu sais, t’as beaucoup de chance d’avoir un copain comme Luc. Il est très très gentil. » Puis Valentine offre un nouveau cadeau à Annette : un foulard jaune très moche, le genre d’accoutrement à la mode en ce début des années 90. Elle se justifie par le fait qu’elle aime « simplement offrir des cadeaux à ses amis. » Annette en profite pour faire remarquer à Joël que lui n’a rien à lui offrir (ce qui est de pure mauvaise foi, puisque dans l’épisode d’avant Joël lui paye un stylo pour écrire ses « poèmes »). Joël décide de lui offrir le meilleur cadeau qu’un petit ami puisse réaliser : un simple baiser. Luc remarque que c’est un cadeau « pas très cher. » C’est alors que Valentine rebondit à nouveau dans la conversation afin de montrer son intérêt pour Luc sous le regard atterré de Virginie :
Valentine : – « Oh mais tu sais Luc, ça peut faire tellement plaisir des fois.
Luc : – (gêné) Ah.
Vivi : – Bah surtout te gène pas, fais lui un petit cadeau pas cher.
Luc : – Oh mais Virginie, dis donc eh oh qu’est-ce que tu vas imaginer là ?
Valentine : – Ah mais je voulais pas parler de ça du tout.
Annette : – Mais Virginie, tu vas pas être jalousie de Valentine quand même ?
Virginie : – Bon bah excuse moi, j’ai dit ça comme ça. »
Valentine a ainsi ouvert une première brèche dans le couple de Virginie. Pire, c’est l’image même de la petite copine de Luc qui est écornée. Elle passe pour une pauvre fille jalouse sans raison valable. Valentine en profite pour semer le trouble dans les esprits en crachant son venin à la figure d’Annette : « Elle est bizarre cette fille, tu trouves pas ? (…) Je dois me tromper vu que c’est ta meilleure amie. » Contente de son coup, Valentine profite de la situation pour s’éclipser, soi-disant pour aider sa mère à la maison, qui est « fatiguée en ce moment. » De quoi passer pour quelqu’un de bien. Annette est définitivement sous le charme : « Tu es une fille géniale. »
Pourtant Valentine a d’autres plans. Alors que Virginie attend Luc à la cafète, elle le surprend encore au côté de Valentine. Il dit l’avoir « rencontrée par hasard » (dans une salle d’expo sur Renoir ?) même si son histoire n’est absolument pas crédible. Il aggrave son cas en expliquant avoir fait visiter à Valentine le studio dans lequel il bosse (celle-ci insiste sur le fait que Luc lui a fait visiter tous les moindres « recoins » des lieux). Virginie est consternée : « Elle exagère, elle peut pas prendre le bus comme tout le monde ! C’est la troisième fois qu’elle se fait raccompagner, elle abuse un peu trop de sa gentillesse. C’est pas son chauffeur non plus ! » Annette rétorque comme à son habitude qu’elle est surtout jalouse, ce que nie encore Virginie : « Comment moi jalouse, non mais ça va pas ma pauvre Annette ! »
L’histoire se répète à nouveau. Cette fois, Luc a du retard. Isabelle, qui n’est jamais bien loin, a son avis sur cette « miss embrouille », qui selon elle va lui piquer son Luc. Virginie furieuse décide de quitter la cafète juste au moment où il finit enfin par pointer le bout de son nez. Il explique alors avoir eu une panne qui l’a obligé à réparer sa moto. Mais Virginie n’est pas totalement débile. Elle note que ses mains ne présentent aucune trace de cette soi-disant réparation et se casse sur-le-champ.
On apprend par la suite avec Annette que Luc avait en réalité été dans chez Valentine pour se laver les mains. Mais le mal est fait. Virginie refuse d’écouter Annette. Elle se clash avec son amie devant Madame Girard et conclut en hurlant : « Une fille me pique mon copain et en plus ma meilleure amie et en plus de ça faudrait que je la remercie. Non tout va très bien Marie, tout va très bien. » A la fin de l’épisode, la tension est palpable. C’est alors que l’on découvre que Annette a attrapé à son tour la varicelle de Monsieur Girard (hum, hum). Ce détail aura son incidence pour la suite des événements.
Le coup de maître
Au petit matin, Annette et Virginie ne se font étrangement plus la gueule, mais Annette cache son visage couvert de boutons. On découvre que Jérôme et Géraldine sont de retour à la cafète, complètement guéris. Luc arrive encore « par hasard » accompagné de Valentine. Il présente la jeune fille, qui s’entend rapidement bien avec les deux tourtereaux qui forment un couple non officiel (Jérôme est toujours avec Justine, repartie aux States). Valentine va même jusqu’à offrir son aide pour leur éviter de croiser Isabelle, qui n’attend que ça pour les dénoncer au prochain retour de Justine.
Le grand affrontement entre les deux garces finit par enfin survenir. Valentine et Isabelle se croisent dans le couloir du lycée. Les rivales échangent autant de louanges que de mises en garde, car ce sont deux harpies qui se respectent autant qu’elles se craignent mutuellement :
Isabelle : – « Jérôme m’intéresse, alors ne marche pas sur mes plates bandes ok ?
Valentine : – Alors ma pauvre Isabelle tu rêves complètement, y a déjà Géraldine sur la liste.
Isa : – Oh mais oui Géraldine Géraldine, mais elle ne me fait pas peur. Tandis que toi je me méfie.
Valentine : – C’est gentil ce que tu me dis là ! Ça veut dire que MOI je te fais peur ?
Isa : – Oui parce que toi je te connais. Tu es une vraie miss embrouille et tu le sais très bien.
Valentine : – Ne t’inquiète pas Isabelle, tu ne risques rien. Sur ce coup là ce n’est pas Jérôme que je veux. C’est Luc.
Isa : – Huhuhu, Luc ? Bah tu veux que je te dise, ça tombe très bien, parce que les coursiers ne m’ont jamais intéressée. »
Après ce bref échange, Valentine s’attaque à Virginie. Cette fois, elle passe à l’offensive et se montre incroyablement perfide : « Je suis gênée de te dire ça, je voudrais pas qu’il y ait un malentendu entre nous. Eh bien, j’ai un problème : Luc me drague, il veut sortir avec moi, et je sais pas comment m’en débarrasser. Tu comprends, j’ai préféré te le dire parce que je ne veux pas de malentendus entre nous. » Virginie est sur le cul. Elle savait qu’il y avait anguille sous roche, mais elle pensait surtout que c’était sa rivale qui voulait se farcir son Luc, et non l’inverse. Elle tombe alors naïvement dans le piège : « Je me suis trompée à propos de Valentine. En fait c’est une fille très bien, Annette avait raison. »
Ayant gobé le mensonge de Valentine, Virginie provoque elle-même le chaos dans son couple quand elle croise Luc à la cafète. « Bah t’es pas avec Valentine ? », lui demande-t-elle, avant de l’envoyer bouler. Luc ne « comprend pas », il a pourtant fait comme d’habitude (« un bisous, tendre ») mais rien à faire. Il ne peut que soupirer un bon vieux « ah les femmes ! », obligé de laisser partir sa bien aimée qui lui a claqué la porte de la cafète sur la tronche. Valentine, qui n’a pas raté une miette de la querelle du couple, propose alors à Luc de passer voir Annette, restée tout l’épisode calfeutrée chez les Girard. A ce moment-là, seule Géraldine semble avoir un doute sur la nature véritable de Valentine. La manipulation est quasi totale et a affecté toute la petite bande.
En compagnie d’Annette, Luc tente de décoder la crise de sa petite amie. Annette a toujours la même opinion sur le sujet : « Elle est jalouse. » Valentine profite de ce moment pour inventer un tout nouveau mensonge, encore plus grave : « Ça m’ennuie de vous le dire, mais je crois qu’il y a autre chose, mais je peux pas vous le dire (…) Bon, je crois que Virginie est amoureuse de Jérôme. Enfin je ne crois pas, j’en suis sur, parce que c’est elle qui me l’a dit. » Autant dire que cette fausse révélation est un véritable tremblement de terre. C’est en effet une terrible trahison, d’abord pour Annette, car Virginie lui avait promis de ne plus jamais chercher à draguer Jérôme, le mec de sa cousine ! Quant à Luc, il est dévasté, d’autant plus qu’il semble faire une sorte de complexe d’infériorité vis-à-vis de son meilleur ami considéré comme le beau gosse absolu de la cafète (par la suite, la situation changera de manière significative avec les « Années Fac »).
Au même moment à la cafète, Virginie pleure toutes les larmes de son corps. Isabelle se sent alors obligée de lui expliquer ce qui se trame réellement dans cette sombre histoire : « Oh on dirait que Mademoiselle sainte nitouche a un gros chagrin ! Je parie qu’il y a du Valentine là dessous (…) Oui, elle avait fait exactement le même coup à une de mes amies. D’ailleurs elle a réussi, elle lui avait piqué son petit ami (…) Mais bien sur qu’elle t’a menti, elle t’a raconté ça pour que tu disputes avec Luc. Tu vas le récupérer ton petit ami. » Ces paroles réconfortantes ne doivent pas cacher les vraies motivations d’Isabelle : une telle garce a d’abord envie de se venger des manigances de Valentine plus que d’aider Virginie, qui est loin d’être son amie. Le trio Virginie, Jérôme et Géraldine sont désormais au courant de la vraie personnalité de Valentine.
Pourtant, quand Luc, flanquée de Valentine, débarque à la cafète, il tombe bien évidemment sur une scène qu’il n’aurait jamais du voir dans un tel contexte : celle d’une Virginie pleurant dans les bras de Jérôme. Dans une colère noire, Luc s’adresse uniquement à Jérôme : « Je peux te dire qu’on a plus rien à se dire. Salut. » (on ne s’insulte pas dans Premiers Baisers malheureusement).
L’épisode s’achève sur ce cliffhanger de folie. Valentine est au sommet de son art de la manipulation. Sachant que la morale est toujours sauve chez AB, ne reste plus qu’à savoir comment va-t-elle échouer dans ses desseins diaboliques ?
Le retour de flamme
Dans ce qui parait être le lendemain des événements, la scène habituelle du petit-déjeuner des Girard commence très fort. Annette ignore ostensiblement Virginie, puis finit par enfin daigner lui adresser la parole : « Je crois que nous n’avons plus rien à nous dire (…) Y a pas de « mais Annette ». Pour moi tu n’existes plus c’est clair ? » Pauvre Virginie, qui vit pour la première fois dans Premiers Baisers une vraie intrigue, au sein de laquelle son personnage s’en prend vraiment plein la gueule. Le calvaire continue de plus bel pour la Toulousaine quand elle a une nouvelle conversation avec Valentine. Bien décidée à en faire son jouet, elle lui retourne une énième fois le cerveau par ses mensonges :
Valentine : – « Faut que je te parle.
Virginie : – Non je ne veux pas te parler, c’est bon t’as gagné.
Valentine : – C’est pas du tout ce que tu crois, moi j’ y suis pour rien dans cette histoire. (…) Pour Isa j’aurais du m’en douter, elle sème toujours la zizanie. Bon j’ai du des maux avec elle dans le passé, elle cherche à se venger. J’ai dit à Luc que ça servait à rien de t’éviter, mais il a rien voulu entendre. Et puis met toi à ma place aussi, moi je suis dans une position délicate. Toi tu l’aimes et puis il est amoureux de moi alors… moi je veux pas te faire du mal, je fais tout pour te protéger. »
Virginie qui n’a pas réussi à connecter ses deux neurones, est plus que jamais perdue. Désormais, elle dit ne plus savoir « qui croire ». De son côté, Valentine ne perd pas de temps et part retrouver Luc complètement déprimé sur son flipper. Manifestement, elle a décidé de monter d’un cran dans la séduction. Elle lui prend la main, l’appelle « mon chéri ».
Se disant étonnée de le voir encore à la cafète, notamment « après ce qu’il s’est passé hier », Valentine prend cette fois le masque de la fille gentille, compréhensive et compatissante envers l’ex de Luc. Elle confie même ressentir des « remords » pour avoir raconté l’histoire avec Jérôme. Selon elle, il est nécessaire de la « comprendre », sachant que ce n’est pas vraiment sa faute puisqu’elle « aime autant Jérôme que Luc ». Elle pousse le vice jusqu’à supplier Luc de « ne pas lui briser le cœur. » L’effet escompté ne se fait pas attendre, car Luc ne marche pas, il court ! Entendre de la bouche même de Valentine qu’il doit revoir Virginie, celle-là même qui a eu le culot de le tromper avec son meilleur ami, c’est purement inadmissible. Rarement Luc ne passera autant pour un con avec cette garce manipulatrice : « Valentine, tu es une fille formidable, mais tu es beaucoup trop gentille. »
Par chance pour les plans de la vipère diabolique, Virginie débarque à la cafète au moment où Valentine supplie Luc de lui parler. Luc refuse catégoriquement, ne souhaitant plus lui adresser la parole ni même lui jeter un regard : « Non, j’ai rien à lui dire. » En ayant joué sur les deux tableaux, Valentine a prouvé qu’elle a tout fait pour aider son « amie » Virginie, alors qu’en réalité elle a empêché tout dialogue entre les deux amoureux. Jérôme et Géraldine, qui ont assisté à la scène, tombent à leur tour dans le piège : « C’est sympa ce que tu fais. » Seule Géraldine semble avoir un léger doute, si l’on en croit sa façon d’observer Valentine. Elle n’en dit toutefois pas un mot.
A la maison des Girard, Annette, en voie de guérison, demande comme souvent conseil à Monsieur Girard. Elle prend le prétexte d’une dissertation sur le sujet des « déceptions dans la vie » pour résoudre son conflit avec Virginie. Monsieur Girard offre d’abord une belle leçon philosophique sur la déception que chaque être humain connaît à peine sorti du ventre de leur mère. Mais Annette recentre Roger sur ce qui l’intéresse, à savoir la déception en amitié. Roger explique alors que selon lui, « le plus important, c’est de parler, de ne jamais fuir devant la situation. » Comme toujours, Annette est émerveillé par les mots qui sortent de la bouche de Monsieur Girard, et n’en demande pas davantage. En outre, il semble évident que si les personnages avaient appliqués les conseils de Monsieur Girard, les plans de la garce diabolique auraient été rapidement contrecarrés.
Valentine passe « innocemment » voir Annette afin de faire un petit état des lieux de la situation. Elle raconte que Virginie est venue en premier la voir, afin selon ses dires malfaisants « de se mettre bien avec elle. » D’une perfidie absolue, elle explique que Virginie « ne veut plus voir Luc, qu’il n’y a rien à faire. » Bien que ces propos soient totalement faux, Annette mort à l’hameçon et s’énerve davantage quand elle apprend que Virginie est actuellement chez Jérôme. Son idée est de suivre le conseil de Monsieur Girard et d’aller dire ses quatre vérités à Virginie.
Pour la première fois, Valentine montre des signes de panique. Elle n’avait en effet absolument pas prévu que Annette puisse sortir de la maison. Elle fait alors tout son possible pour empêcher Annette de partir à la rencontre de Virginie, mais il n’y a rien à faire devant une telle furie. Par chance, quand Annette ouvre la porte de la chambre de Jérôme, elle découvre une scène incroyable : Virginie et Géraldine sont toutes les deux allongées dans son lit, portant les fringues du garçon… une scène « dégoûtante » pour une fille moraliste comme Annette qui s’enfuit illico, sans même leur adresser la parole.
Néanmoins, Annette est encore une fois totalement à côté de la plaque. Jérôme n’était pas en train de préparer un threesome, mais avait tout simplement renversé du jus de fruits sur les pantalons des filles ! En outre, le trio a pris définitivement parti pour Valentine. Virginie avoue s’être « trompée », Valentine étant « une fille bien ». Elle se dit même « gênée pour elle, car se retrouver dans une telle situation est vraiment pas évident pour elle. » Même Géraldine acquiesce et finit par penser à son tour que c’est bien Isabelle la coupable dans cette histoire : « Encore une fois, elle aura semé la zizanie. »
De retour à la cafète, Annette pleure de dégoût, de honte, de désespoir aux côtés de Joël, Luc et Valentine. Alors qu’elle avait dès le départ pris le parti de se méfier de Géraldine, elle constate qu’elle aurait du aussi « se méfier de Virginie (….) Elle m’a bien eu, qu’est-ce que je peux être gourde ! » Joël est le seul de la bande à ne pas croire à cette histoire : « Ça ne leur ressemble pas (…) c’est incroyable, je les connais bien, c’est insensé qu’ils aient pu faire ça. »
Mais Annette persiste et invoque même l’esprit de Monsieur Girard : « Lui aurait dit qu’il faut se méfier de l’eau qui dort et il aurait eu raison ! » Alors que tout semble lui sourire, qu’elle parait être à deux doigts du but, Valentine ne peut dissimuler son inquiétude. Elle insiste pour quitter les lieux, d’autant plus que le trio accusé de luxure vient pour s’expliquer. La garce argue qu’il ne faudrait pas « provoquer un esclandre. » Mais Annette et Luc se disent prêts pour une grande explication. Et au pire, ils expliquent que de toute façon, ce n’est pas à eux de changer d’établissement.
Le « retour de flamme » s’abat alors enfin sur Valentine au moment où Jérôme prend Luc à part : « Faut qu’on se parle mon grand. » L’épisode s’achève alors à la cafète, après cette fameuse explication. On ne verra plus jamais Valentine, enfermée de force dans les toilettes ! Luc et Virginie peuvent s’embrasser goulûment, tout va mieux dans le meilleur des mondes. Pourtant, rarement la situation n’aura été aussi tendue entre les personnages de Premiers Baisers. Tout le monde semble a été plus ou moins atteint par l’œuvre malfaisante de Valentine. Voici un état des lieux après la tornade :
– Annette est celle qui semble le plus affectée par cette histoire : « Comment on a pu être aussi bêtes pour marcher ? » On aimerait surtout lui demander comment elle a pu être aussi odieuse avec la cousine de sa meilleure amie… Car Annette a largement préféré prêter l’oreille aux paroles vénéneuses d’une totale inconnue qui ne faisait que la flatter. Elle tente néanmoins maladroitement de se justifier : « Entre mes boutons et mon plâtre, je n’avais pas tellement les yeux en face des trous. Sinon jamais elle m’aurait eu comme ça. » Il n’y a bien que Isa pour se moquer de cette misérable excuse. Heureusement pour Annette, Virginie est tellement contente de retrouver son Luc qu’elle préfère ne pas lui en vouloir : « Tu sais à ta place j’en aurais fait autant. Elle nous a tous manipulés en tout cas. »
– Joël a au contraire été tout à fait digne et a conservé une bonne image. N’étant pas la cible des agissements de Valentine, il a pu observer avec distance la bande se déchirer, sans avoir à s’impliquer directement. Au final, il est le seul à n’avoir jamais douté de ses amis.
– Luc se voit comme le grand dindon de la farce : « Ouais, on a été manipulé, moi le premier. J’ai vraiment été idiot. » Luc a montré dans cette histoire que sa jeune histoire d’amour avec Virginie demeure fragile. Tout au long de la saga, son couple sera de même affecté par ce type de situation. De nombreuses filles tourneront autour de lui pour lui mettre le grappin dessus, tandis que Virginie restera comme l’éternelle cocue de service.
– Virginie est bien entendu celle qui a été le plus humiliée. Elle est passée pour une jalouse maladive, une menteuse, puis pour finir comme une nymphomane manipulatrice. Elle a versé des litres de larmes, ignorée dans sa douleur par celle qu’elle croyait être sa meilleure amie (du moins « en attendant le retour de Justine », comme a toujours tenu à le rappeler Annette).
– Jérôme et Géraldine ont plutôt bien profité de la situation. Géraldine y voit d’abord la réussite d’une grande manipulatrice : « Elle avait tout prévu en tout cas. » Ce qui est relativement faux puisque Valentine a aussi su profiter d’événements totalement imprévisibles (comme la varicelle d’Annette ou le jus de fruit renversé par Jérôme). Mais surtout, cette histoire permet au couple officieux de se rapprocher publiquement, même si Annette veille.
– Isabelle a pu montrer une facette plus positive de sa personne en aidant Virginie. Elle a raison à de rappeler que Valentine n’avait pas prévu son intervention. Elle considère et se flatte à juste titre d’avoir « un peu contrarié ses plans. » Heureusement, cette alliance de fortune ne dure pas et une fois sa rivale éliminée, Isabelle redevient l’ennemie attitrée de la bande.
– Monsieur et Madame Girard ne sortent pas non plus totalement indemnes dans l’histoire. Roger est passé une énième fois pour un con quand Valentine lui a fait croire que « Amour Toujours » était une série géniale. En outre, la « gestion de crise » de sa varicelle montre une fois de plus qu’Annette a des visées sur le père de sa « meilleure amie ». Isabelle le perçoit mieux que tout le monde et tente non sans sadisme d’avertir Joël, qui préfère ignorer ses dires en se disant « immunisé » contre son venin. Pourtant, Isabelle avait vu juste… Enfin Madame Girard en a pris pour son grade en essayant de comprendre ce qui se tramait entre Virginie et Annette : cette dernière l’envoie clairement chier en lui balançant à la figure qu’elle est « trop vieille » pour comprendre leurs histoires. De quoi alimenter les thèses les plus folles sur la rivalité entre Annette et Madame Girard.
La fille d’Évelyne Leclercq !
Enfin, reste une dernière question : que faire de Valentine ? On sait que dans les Années Fac par exemple, elle aurait probablement été violée et torturée, puis re-violée par Luc et Anthony. Mais dans Premiers Baisers, on reste malheureusement dans un cadre enfantin. Il n’y a pas même une bonne baffe à se mettre sous la dent. On comprend simplement que Valentine passera une nuit enfermée dans les chiottes de l’Alfredo’s. Une punition pas vraiment à la hauteur du fantastique plan machiavélique de Valentine contre la bande, et plus particulièrement contre Virginie qui vit (enfin) son dépucelage des scénarios diaboliques d’AB.
Malheureusement, on ne reverra plus jamais Céline Leclercq dans une sitcom AB. Celle qui est en réalité la fille de Évelyne Leclercq (la fameuse animatrice de « Tournez Manège ») a sûrement été pistonnée pour ce légendaire rôle de Valentine au sein de dans Premiers Baisers. Néanmoins, force est de constater qu’elle a su proposer une interprétation formidable de la peste ultime de sitcom. Sa manipulation sur une longue durée (quatre épisodes, c’est énorme dans le contexte AB), sa perfidie, ses flagorneries, ses mesquineries et ses mensonges qui s’empilent avec une concision extrême, sont des références pour quiconque apprécie ce type de personnages de « méchantes ». On aurait franchement aimé revoir Céline dans un autre contexte, ou un retour fracassant de son personnage dans les Années Fac. Seul le personnage de Clarisse fera honneur au « style » Valentine. Mais la manipulation de cette nouvelle garce diabolique tournera davantage autour du sexe, chose que ne pouvait faire Valentine dans l’univers aseptisé de Premiers Baisers.
L’expérience de Céline en tant que comédienne semble s’être arrêtée là. On ne sait pas vraiment ce qu’elle est devenue, si ce n’est qu’elle a trois enfants. Dans son enfance, elle avait participé à une chanson au côté de sa mère en 1978, Nous l’appellerons Marie. Un titre incroyablement bidesque, dans lequel on découvrait une petite Céline très malheureuse, avec absence du père…etc. Elle chantait l’arrivée d’une petite sœur, qui enfin devait la rendre heureuse ! En tout cas, force est de constater que la petite Céline qui chantait terriblement mal dans ce « tube » (c’était une gamine, dans le style des mômes qui chouinaient dans les titres de Bernard Minet) n’aura jamais connu cette fameuse petite sœur…
Toutefois, Céline semble avoir été très choyée, du moins par sa mère : « Nous entretenons une relation fusionnelle depuis que Céline est née. Je l’ai toujours emmenée partout, j’ai assuré son éducation avec beaucoup de bonheur et d’amour. » En 2012, à la surprise générale, la mère et la fille ont réapparu à l’antenne, dans l’émission « Un dîner presque parfait ». Évelyne, visiblement en pleine forme et vivant par ailleurs une sorte de deuxième jeunesse, y participe en qualité de candidate VIP dans une spéciale « Nice ». On peut surtout y revoir notre Céline qui passe faire un petit coucou à sa chère maman au moment de la réalisation d’un tiramisu !