Comme Dieu est bon d’avoir créé la femme salope ! Sinon elle ne serait que chiante.
Frédéric Dard.
« Seul le personnage d’Isabelle pimentait la série de ses coups bas et autres méchancetés »
« Dans toutes les séries AB, il fallait une méchante ou un méchant. Pour Premiers Baisers, Jean-Luc Azoulay avait créé Isabelle, sombre peste un peu bêcheuse, amoureuse de Jérôme, mais selon un rapport plus sado-masochiste que les autres filles de la série. Incarnée par Julie Caignault, adorable petite blonde aux yeux bleus, qui était à l’opposé du personnage qu’elle jouait, Isabelle cristallisait tous les travers et tous les délires machiavéliques qui permettaient au public de décharger son agressivité sur au moins un des personnages. Les autres étaient trop lisses pour cela. Seul le personnage d’Isabelle pimentait la série de ses coups bas et autres méchancetés. »
Voilà comment Fabien Remblier introduit brillamment Julie Caignault dans son livre, les Années Sitcom. Dans l’univers fade et coloré de Premiers Baisers, le personnage d’Isabelle apporte une touche de saloperie féminine indispensable au bon déroulement de la série. C’est la fouteuse de merde, la salope de service, mais aussi celle qui dit la vérité, pas toujours bonne à entendre, sur les multiples cocufiages qui accompagnent les aventures sentimentales des « gentils ». Pourtant, rien ne disposait au départ à faire de la jeune et jolie Julie une peste.
« A l’école maternelle, Julie faisait déjà ses premiers pas sur les planches au sein d’une troupe de théâtre. Le talent ne s’improvise pas, il est inné »
De l’avis de tous ses proches et collègues que nous avons pu contacter, Julie est une « fille adorable ». Comment Julie en est-elle alors arrivée à jouer la garce de service ?
C’est d’abord vers l’inévitable Télé Club Plus (TCP) qu’il faut se tourner pour en savoir plus sur sa personnalité : « Julie est une force de la nature, et ça se voit ! Élevée à Paris par un papa médecin, elle avait tout pour réussir de brillantes études scientifiques. La vie en a décidé autrement car la comédie s’est emparée d’elle dès son plus jeune âge. A l’école maternelle, Julie faisait déjà ses premiers pas sur les planches au sein d’une troupe de théâtre. Le talent ne s’improvise pas, il est inné. Malgré cette envie dévastatrice de jouer, Julie passe son bac A1 pour s’inscrire à la fac et ainsi ne pas avoir de regrets… Mais le destin n’a plus d’emprise sur sa personne et elle prend en main les rênes de sa vie. Avec deux parents aussi prestigieux, elle n’a aucun remord à quitter les bancs de l’école. Les encouragements fusent de toute part, même de papa et maman. »
« Avec le rôle d’Isabelle, j’ai l’impression de jouer vraiment »
Jouer la comédie apparaît comme une véritable vocation pour cette fille de gynécologue, comme elle le confiait à l’époque : « Du plus loin que je me rappelle, j’ai toujours voulu faire du théâtre. Quand j’étais petite, je montais des spectacles des copains. Mes parents, qui ne connaissaient pas ma passion, m’ont laissé faire à une condition : que je passe d’abord mon bac. Je me suis inscrite à un cours d’art dramatique. Trois ans plus tard et après quelques apparitions, j’ai décroché le rôle d’Isabelle. » Et quel rôle, comme le rappelle TCP : « Jouer une garce était loin de la faire renoncer. En bonne fonceuse, elle prend son rôle à bras le corps et parvient à se faire une place à part entière au sein de l’équipe. » L’autre raison du choix de Julie pour le rôle d’Isabelle, est certainement son physique de jeune fille aux faux airs innocents : « Depuis dix ans, j’ai toujours la même tête de petite fille. On me donne 17 ans alors que j’en ai 22. Ça m’a valu de jouer des rôles d’ingénues aux cours de théâtre. Avec le rôle d’Isabelle, j’ai l’impression de jouer vraiment. »
Toutefois, ce que le journal officiel d’AB « oubliait » d’écrire à l’époque, et que Julie avouera plus tard dans la presse, est que la jeune comédienne a été choisie suite à un casting… pour une pub d’un célèbre condiment, habituellement élaboré à partir de sauce tomate, de vinaigre et de sucre : « Comment j’ai été choisie ? Vous allez rire : c’est à la suite d’un casting pour une publicité de ketchup. Eh oui, je suis déjà apparue dans certains spots publicitaires tels que U.A.P, pour une marque de yaourt, et pour un jeu qui s’intitulait Cash. Bref, finalement je n’ai pas été prise pour la pub. »
A l’instar de ses nouveaux collègues, la jeune comédienne fait donc ses grands débuts dans le « milieu » avec les tournages de Premiers Baisers. Les premiers épisodes sont poussifs pour Julie comme pour le reste de l’équipe. Mais très vite, le personnage d’Isabelle trouve son style, souvent imité mais jamais égalé par la suite : gestuelle maniérée, léger accent bourgeois et un don royal pour créer des situations malsaines. Isabelle devient en quelques épisodes la peste attitrée du groupe d’amis, celle que le téléspectateur devra détester mais dont il ne pourra se passer.
C’est pourquoi chez AB, on tient tant à mettre en valeur l’image de la comédienne, en étalant dans tous les réseaux de presse ses qualités et sa gentillesse, afin d’éviter un lynchage public. Ce dernier ne semble pas prompt en effet à différencier les subtilités entre un personnage caricatural de sitcom et son interprète.
Ainsi, c’est avec sa subtilité légendaire que Télé Club Plus nous offre dans ses papiers un véritable panégyrique de Julie Caignault : « Dans la vie, Julie vit à Paris dans un grand appartement du cinquième arrondissement. Elle passe ses journées à se balader dans sa ville qu’elle aime par-dessus tout. Julie s’intéresse aussi bien à la musique (Higelin, Gainsbourg) qu’à la littérature (Céline, Vian). L’amitié tient une grande place dans sa vie, elle a fait de ses amis une véritable religion. Fidèle et sincère, Julie, dès qu’elle quitte le champ des caméras, ressemble un peu au personnage d’Annette. Il faut se rendre à l’évidence : sans les copains, la vie serait triste. »
« Étaler sa classe sociale, cracher sur les pauvres et mépriser ses camarades de classe moyenne »
Pour enfoncer le clou, on en appelle à la famille pour (r)assurer la mère de famille lambda, forcément choquée par l’attitude d’Isabelle : « Mes parents sont ravis. Ils auraient sans doute aimé que je fasse HEC ou Sciences Po. Mais quand ils m’ont découverte en tant que comédienne en regardant la série, ils ont été contents de m’avoir laissé choisir mon métier. Mon père est devenu fan de Premiers Baisers. »
Dans la même veine, Julie tente de trouver une justification (tirée par les cheveux) éducative à son personnage en invoquant son petit frère : « J’ai la même volonté qu’Isabelle. Je vais au bout de mes idées. Je reconnais aussi que mon rôle m’a parfois aidée à conseiller mon petit frère, Antoine, quand il avait un problème avec les filles. Il est tellement gentil qu’il se fait souvent embobiner. Je lui explique ce qu’aurait fait Isabelle. » Voilà donc une explication positive au personnage d’Isabelle : celle-ci doit servir de contre-exemple à la jeunesse masculine française : les enfants, méfiez-vous des filles, regardez cette garce d’Isabelle… toutes des salopes !
Il faut dire que la petite blonde nous offre un large panel de toutes les saloperies possibles et imaginables qu’une garce se doit de posséder. Les trois passions dans la vie d’Isabelle sont :
– Sortir avec le plus de garçons possibles, et si possible avec les petits copains de ses rivales, voire avec leurs papas, et ce par tous les moyens immoraux envisageables.
– Avoir un ou plusieurs esclaves masculins à disposition (pour porter les sacs, faire les courses, faire la manucure, servir de garde du corps…etc).
– Enfin étaler sa classe sociale, cracher sur les pauvres et mépriser ses camarades de classe moyenne (c’est une fille à papa).
Pour éclairer ces sombres tableaux, nous vous proposons une sorte de top des plus grandes saloperies d’Isabelle, afin de mieux cerner le personnage.
« La difficulté de ce genre de personnage vient du fait que, comme bien souvent, le public nous assimilait à nos personnages »
Isabelle est sans constations possible La vraie garce de la série, toujours là pour emmerder la bande de Justine. Pourtant, au plus grand étonnement du téléspectateur assidu, Isabelle reste dans le groupe de Justine quoiqu’il arrive, jamais très loin lorsqu’il s’agit de mettre son grain de sable. Peut-être aussi parce qu’elle est la moins hypocrite de la troupe, en première ligne pour dénoncer un camarade qui trompe sa copine officielle. Julie est aussi le personnage qui inspirera l’autre grande garce lubrique d’AB, la célèbre Nathalie d’Hélène et les Garçons, interprétée par Karine Lollichon. Et comme Karine, Julie Caignault va connaître la joie de subir le courroux du public de l’époque, incapable de pardonner à la comédienne les vices de son personnage.
En effet, contrairement à ce qui pouvait être lu dans la presse de l’époque, Julie n’a pas vraiment été aimée du public. Comme d’habitude, TCP dépeigne un univers parallèle au nôtre : « C’est un rôle assez fort et qui a la chance de plaire. Malgré l’image de garce que donne mon personnage, je reçois des lettres adorables et on m’aborde souvent dans la rue pour me demander un autographe. Même quand je me cache derrière mes lunettes noires et une casquette (…), je n’ai jamais reçu de lettre me disant qu’on me détestait. Le courrier que je reçois est très sympa. »
« La plus grande joie de Julie était, lorsque les courageux qui l’avaient insultée se décidaient à venir lui demander une photo dédicacée, de signer Va te faire mettre au lieu de Julie Caignault »
Néanmoins, Julie raconte un détail dans cette même interview qui montre que quelque chose d’étrange se passe autour d’elle : « Beaucoup m’écrivent : Même si tu es méchante dans la série, on sait qu’en vrai ce n’est pas le cas. On t’adore. Tout cela me fait très plaisir. » Certes, les analyses de la sociologue Dominique Pasquier avaient montré, par l’étude du courrier des fans, que ceux-ci savaient faire la différence entre les personnages de « méchants » et les comédiens. Mais son ancien collègue Fabien Remblier, a vu les choses différemment. Son témoignage relativise l’amour du public pour Julie : « La difficulté de ce genre de personnage vient du fait que, comme bien souvent, le public nous assimilait à nos personnages, Julie n’était pas terriblement appréciée du public et recevait injures verbales et lettres d’insultes, ce qui à la longue peut être fatiguant, même si on a pris le parti d’en rire. »
Heureusement, les comédiens de Premiers Baisers semblent avoir pris un malin plaisir à s’amuser de la bêtise des fans : « Julie prenait beaucoup de plaisir à interpréter son personnage. Elle en exagérait les traits le plus possible, jouant à se faire détester du public. La plus grande joie de Julie était, lorsque les courageux qui l’avaient insultée se décidaient à venir lui demander une photo dédicacée, de signer « Va te faire mettre » au lieu de Julie Caignault… Bien peu s’en sont vantés après ! »
D’ailleurs la relation entre Julie et Fabien apparaît comme très bonne (comme quoi, Fabien avait de bons rapports avec certains de ses collègues contrairement à une rumeur tenace) : « Je m’entendais très bien avec Julie. Elle avait immédiatement capté ma capacité à m’énerver rapidement quand quelque chose n’allait pas et s’amusait, dans ces moments-là, à m’appeler Choupinet, ce qui me faisait rire et me calmait instantanément. »
« Depuis que j’ai quatorze, quinze ans, j’y écris tout ce qui me passe par la tête. Trois lignes ou trois pages selon mon inspiration. C’est sur ce carnet qu’est née Lola aime le chocolat »
Si de l’avis de tous, Julie Caignault est une des meilleures comédiennes de la série Premiers Baisers, jouer Isabelle ne la contente pas. En outre, quoi de mieux pour dépasser son image erronée de garce que de chanter. Presque tous les comédiens AB ont poussé la chansonnette et Julie n’a pas fait exception.
C’est bien sur le terrible binôme Jean-Luc Azoulay/Gérard Salesses qui prend en charge la destinée de la nouvelle carrière musicale de Julie. C’est dans ce contexte de raz-de-marée de « tubes AB » que sort le tube de Julie Caignault : Lola au Chocolat ! Cette chanson, kitsch mais désormais culte des 90’s, est en fait l’œuvre de Julie herself : « Mon carnet ne me quitte jamais. Depuis que j’ai quatorze, quinze ans, j’y écris tout ce qui me passe par la tête. Trois lignes ou trois pages selon mon inspiration. C’est sur ce carnet qu’est née Lola aime le chocolat. »
Quelques autres titres moins marquants sortent : La Même Histoire et Collection de garçons. Ces deux chansons collent nettement avec le personnage d’Isabelle, puisqu’il est question de nymphomanie et de difficulté à tomber amoureuse d’un bon garçon. Néanmoins, la carrière de chanteuse de Julie ne décolle pas. Aucun album ne voit le jour, ce qui est fort regrettable.
« Jean-Luc essaya de lui adjoindre une comparse, mais la personne choisie ne resta qu’assez peu de temps. Ce nouveau personnage n’apportait rien à celui d’Isabelle si ce n’est de diviser ses répliques par deux, ce qui n’avait rien d’indispensable. Julie assumait la méchanceté d’Isabelle mieux que personne »
Du côté de Premiers Baisers, c’est presque la routine pour Julie. Toujours enfermée dans son personnage d’affreuse qui martyrise à longueur d’épisode ce « pauvre Jean-François », pour lequel nous vous avons déjà gratifié d’un pathétique article, Julie semble se lasser. Pour dynamiser le personnage d’Isabelle, les scénaristes tentent alors de briser son côté solitaire.
Fabien Remblier relate l’échec de cette tentative : « Jean-Luc essaya de lui adjoindre une comparse, mais la personne choisie ne resta qu’assez peu de temps. Ce nouveau personnage n’apportait rien à celui d’Isabelle si ce n’est de diviser ses répliques par deux, ce qui n’avait rien d’indispensable. Julie assumait la méchanceté d’Isabelle mieux que personne. » Cette acolyte que Fabien ne nomme pas (sûrement par oubli), c’est la terrible Céline Sauvage, le « canon » qui séduit toute la bande avant de rejoindre le « côté obscur » au côté d’Isabelle.
D’autres seconds couteaux avaient auparavant été testés, mais c’est Céline qui a tenu la corde pendant plusieurs épisodes. Originaire dans la série d’une famille de la haute bourgeoise, la beauté froide n’a malheureusement pas réussi à s’imposer en compagnie de la charismatique Julie, et a malheureusement disparu sans laisser de trace.
« Jean-Luc, très friand de ce genre de situation, réussit à convaincre Igor Butler de venir jouer dans quelques épisodes de Premiers Baisers »
Jean-Luc Azoulay, mais en panne d’inspiration, a encore une idée de génie pour le personnage d’Isabelle : il décide, sans prévenir personne, d’introduire dans la série le vrai petit ami de Julie, le rockeur Igor Butler. Fabien Remblier se souvient bien de ce grand moment de télévision, qui n’est pas sans rappeler l’épisode « Joël » pour Magalie Madison : « Julie avait rencontré Igor Butler qui jouait sur Seconde B, et ils sortaient rapidement ensemble. Jean-Luc, très friand de ce genre de situation réussit à convaincre Igor de venir jouer dans quelques épisodes de Premiers Baisers. C’est tout naturellement qu’Igor joua Igor, le nouveau petit copain d’Isabelle, reléguant Jean-François à son rôle de porteur de sac masochiste. »
Pour saisir l’énormité de la situation, il faut rappeler le contexte de « la guerre des sitcoms » qui a fait rage lors de l’année 1993. Face au succès des sitcoms AB Productions, le service public tente de contre-attaquer avec sa propre sitcom, qui se veut à l’opposé des « mièvreries » de Jean-Luc Azoulay. Ce sera Seconde B, une série sociale (socialiste ?) localisée en banlieue, avec des beurs, des noirs, des pauvres…etc. Igor Butler y joue Mickaël, un rockeur grunge de la cité.
Un beau jour, il faudra démontrer que Seconde B n’aura jamais réussi à concurrencer les sitcoms AB, tant par la qualité « sitcomologique » que par les soi-disant « sujet de société ». Quoi qu’il en soit, l’histoire d’amour entre Julie Caignault et Igor Butler symbolise la rencontre de ces deux univers que tout oppose, mais qui ne sont finalement pas si éloignés que ça. Un peu comme l’UMP et le PS. D’ailleurs l’anecdote que le jeune couple raconte sur leur première rencontre est édifiante : « Elle s’est très mal passée. Nous étions tous les deux invités à une soirée de presse, moi pour Premiers Baisers, lui pour Seconde B. Nous nous étions jamais vus avant. J’étais en train de signer des autographes. Il m’a présenté un papier en disant : « pour Igor de Seconde B ». Je me suis dit « ce mec est nul » et il a pensé la même chose parce que j’ai signé sans même le regarder. En fait je n’avais jamais suivi un épisode de Seconde B et je connaissais même pas la tête d’Igor. Je l’ai trouvé complètement fou de demander un autographe, je n’en voyais pas l’intérêt, et pour lui, j’étais une idiote de lui en avoir signé un. Il l’a déchiré d’ailleurs. On se méprisait totalement. »
« C’était sympa de jouer les tombeurs, en faisant abstraction du fait que Julie est ma femme dans la vie, et de mon rôle dans Seconde B »
Finalement, comme dans un scénario AB, la magie de l’amour opère. Tout va très vite, trop vite entre les deux comédiens : « Nous nous sommes retrouvés dans un bar pour finir la soirée, lui avec ses copains, moi avec les miens. Nous avons passé la nuit à parler. Depuis nous nous sommes plus quittés. On s’est marié à Las Vegas le dimanche 18 juillet à 11h15 du matin, heure locale, avec pour témoin une dame qui était le témoin du jour. On se connaissait depuis trois semaines ! » Pour Jean-Luc Azoulay, l’occasion est trop bonne de faire une « prise » dans le camp adverse. Igor Butler, en bon mercenaire de sitcom, accepte la proposition de JLA, sans avoir vraiment le temps de prendre conscience de la portée de son acte : « En fait ça s’est passé de façon marrante. Un soir, le producteur m’a demandé si ça m’amusait de tourner dans la série. J’ai à peine eu le temps de répondre que j’étais déjà sur le plateau. J’ai bien aimé l’expérience, une façon différente de travailler. C’était sympa de jouer les tombeurs, en faisant abstraction du fait que Julie est ma femme dans la vie, et de mon rôle dans Seconde B. »
« Je continue à travailler… avec parcimonie ! »
Mais pour Julie Caignault, l’irruption de sa vie privée dans la série a été plutôt mal vécue : « Je n’y suis vraiment pour rien et franchement, je n’ai pas trouvé ça génial. Il y a longtemps que je joue dans la série : je connais trop les comédiens et j’ai pas raffolé de l’idée d’intégrer Igor dans mon monde. Je n’aime vraiment pas mélanger ma vie privée et ma vie professionnelle. » On touche ici un point sensible pour tous les comédiens passés par les productions de Jean-Luc Azoulay. Igor joue Yvan, une sorte de Casanova du pauvre, qui séduit Isabelle, pour le coup transformée en femme soumise. Passé l’effet de surprise, ce « coup de théâtre » scénaristique tombe vite à plat et Yvan disparaît sans sommation après une dizaine d’épisodes.
Quant à Isabelle, elle redevient la garce dominatrice habituelle, comme si rien ne s’était passé. Toutefois, les deux tourtereaux ne se lâchent plus. Après leur mariage à Las Vegas, qui a fait quelques couvertures de presse, le couple continue de collaborer dans la chanson. Plein de projets dans la tête, Julie croit en son homme : « Nous avons la même philosophie de vie, nous sommes des épicuriens. Nous vivons au présent. Igor doit m’écrire une chanson en anglais. »
Malheureusement, on n’aura jamais la chanson d’entendre le résultat du travail d’Igor. Mais Julie persiste. Elle quitte Premiers Baisers par la petite porte au début de l’année 1995 : le dernier épisode dans lequel elle est créditée semble être « Copains de Régiment ». Depuis plus rien, aucun nouvelle, pas même dans la série. Julie a préféré rejoindre son petit ami dans la suite de Seconde B : « J’ai tourné environ 300 épisodes de Premiers baisers et arrêté de mon propre chef avant la fin de la série. J’ai tourné 90 épisodes de C’est Cool, soit la totalité. »
La dernière trace de Julie dans l’univers AB reste sa participation dans la mythique compilation Stars TV, volume 2. Comme elle nous l’a précisé, le « troisième single est ‘Lolita’ 1994, dont j’ai écrit les paroles. Mais comme je venais d’arrêter la série, cette chanson a été incluse dans une compilation ‘Star Movies’ (sic) et n’a fait l’objet que d’un seul passage télé, plus le zapping de Canal ! » Cette chanson de Julie est très différente de ce qu’a pu proposer Julie jusque-là. Probablement inspirée par la chanson à succès de Big Soul (Le Brio), elle est rock et punchy. On y reconnaît bien la voix de Julie et son amour pour le rock’n’roll.
L’idylle entre AB et Julie s’achève brutalement là. En outre, la série C’est Cool est un échec total (à quand une rediffusion pour que l’on puisse juger ?). Mais la carrière de Julie ne s’est pas totalement arrêtée pour autant : « J’ai tourné dans une douzaine de courts et moyens métrages, dont le premier « Ange, mon démon » date de 1995 et est réalisé par Igor. En 1997, j’écris, produis, réalise et interprète mon court « Nos petits tracas », sélectionné aux Festivals de Sarlat et de Cergy-Pontoise. (Pour plus d’infos sur le film, allez sur le site d’Unifrance). En 1998, un long métrage « Digital diaries » réalisé par Richard JOHNSON. »
Dans les années 2000, Julie change de vie. Elle quitte Paris, sa ville chérie, et divorce. Depuis, Julie reste dans le monde de l’art, mais se fait très discrète : « J’ai travaillé dans la mode, la photo et l’art. En ce qui concerne la photo, je n’ai jamais été photographe, mais rédactrice ou directrice artistique en presse. Et je m’y suis aussi intéressée en tant que galeriste par la suite. Mon dernier tournage a eu lieu cette année, donc je continue à travailler… avec parcimonie ! » On espère qu’un jour Julie changera d’avis et se décidera à raconter ses années sitcom. Et peut-être qui sait, faire son grand retour dans les Mystères de l’Amour, série qui donne toute sa place aux personnages de garces manipulatrices.
Notes :
– Les citations de Fabien Remblier sont extraites du livre Les Années Sitcom, Mediacom, 2005, Paris.
– Les citations de la presse AB et de Julie Caignault sont disponibles sur le forum de la sitcomologie
DiscussionUn commentaire
J’ai vu quelques épisodes des « Années fac » depuis que la série a été mise en ligne sur Youtube. Je trouve que le personnage de Sandra, incarné par l’actrice Aurore Bunel est encore plus peste qu’Isabelle ne l’était dans « Premiers baisers ».